Changement de paradigme
pour le foncier d’entreprise

Par La rédaction, 15 mai 2023 à 07:50, Sophia Antipolis

Polis

23 projets immobiliers sont en cours sur la technopole ou viennent d’être livrés cette année. Si 12 programmes sont 100 % tertiaires, 7 commencent à mélanger bureaux et logements et sont le signe que Sophia Antipolis prend résolument le virage de la mixité d’usage. Un projet se positionne en havre utile pour les entreprises artisanales, rappel bienvenu que tout n’est pas Tech en ces terres. Zoom sur deux initiatives privées qui sont en train de changer le visage de la technopole.

40 000 m² supplémentaires vont sortir de terre d’ici 2025 en s’adaptant aux contraintes de site de la technopole. Forte composante paysagère, limites de hauteur à la crête des collines du parc, intégration réfléchie des mobilités douces, sobriété énergétique, récupération des eaux... Sophia continue de montrer que développement durable et développement tout court ont des complémentarités vertueuses. Dans les tuyaux de ce renouveau, la rédaction s’est intéressée à deux programmes privés d’immobilier d’entreprise qui vont profondément impacter leur environnement immédiat.



Le Galion et son architecte


Boris Garevski est un personnage. De ceux qui structurent les espaces comme personne. Il connaît Sophia comme sa poche puisqu’il l’a construit. Depuis son premier immeuble de bureaux, le Berlioz en 1990, il a enchaîné les projets d’immobilier tertiaire sur la technopole. L’espace Beethoven (1990), Solaris (2001), Alba (2001), Clara (2002), le Marco Polo (2003), les deux Arcs (2003), le Drakkar (2008), le Business Pôle (2011). Sans compter le reste… Villas prestigieuses, hôtels, lycées, lieux de culte... En tout, il aura construit et réhabilité près de 460 000 m² en trente ans sur la Côte d’Azur dont 63 000 m² sur Sophia Antipolis, et plus de 4 100 logements. Il a travaillé tout autant avec de petits promoteurs locaux qu’avec des entités plus musclées.


Si son dernier projet sur la technopole date d’il y a plus de dix ans, il s’est tout récemment attelé au projet du Galion, à la demande de la famille Boisanfray, non moins connue que lui sur Valbonne. Ce projet est intéressant à plus d’un titre. C’est d’abord un projet immobilier qui n’est pas lié au tertiaire. Sur la technopole, c’est assez rare pour être souligné. L’ambition est d’accompagner les artisans et de leur proposer des solutions adaptées pour leurs activités, du stockage à la distribution, en passant par le magasinage et le service après-vente. Ce programme neuf d’une surface de 9 000 m² est composé de 27 modules indépendants, desservis par trois voies de circulation Poids lourds et accessibles de plain-pied partout par de larges portes sectionnelles. Deux monte-charges plutôt costauds sont prévus, l’accès est sécurisé et le site est équipé de vidéosurveillance. Le projet s’inscrit dans un projet architectural de qualité (Boris oblige…) et a cherché à parfaitement s’intégrer dans un environnement particulièrement boisé. C’était d’ailleurs la contrainte principale du site et il a fallu réussir à organiser le foncier bâti sur la moitié d’emprise non forestière. La première pierre a été posée non loin des grues le 27 avril dernier en présence de Philippe Boisanfray, le président de Directoire Finance Holding qui a été à l’initiative du projet, et Florence Vautier, directrice générale de DFH et présidente de PSI, l’entreprise maître d’ouvrage. Tous deux savent parfaitement manier la truelle, DFH ayant en effet largement fait ses preuves sur la technopole depuis 2002 dans l’immobilier d’entreprise. Le chantier du Galion a débuté l’été dernier pour deux ans et est suivi de près par Pascal Ganovelli qui a une longue expérience locale comme maître d’œuvre. La livraison est prévue en début d’année prochaine. Le casting du Galion nous rappelle qu’aucun projet de qualité n’est dû au hasard et que la composition de l’équipe qui pense la conception-réalisation est de loin l’élément le plus important.



Une autre initiative privée récente intéressante a cherché à réhabiliter une friche tertiaire en opérant en même temps une requalification d’usage bureaux-logements. Travailler à côté de chez soi, habiter près de son boulot, peu importe le sens où on l’exprime, ce gain de temps en logistique personnelle est un réel luxe pour beaucoup. Le promoteur belge EQUILIS s’est essayé à la tâche par le projet ambitieux de La Canopée, avec une stratégie d’entrant sur la technopole qui présage d’autres pépites à venir.



Des Espaces Antipolis à La Canopée


C’est un projet de longue haleine qui commence à se concrétiser. Entre l’idée initiale il y a quelques années, la maîtrise foncière (le terrain a été acheté fin 2019) et la délivrance du permis de construire en octobre 2022, de l’eau a coulé sous les ponts. Pour Laurent Tirot, PDG de la filiale française d’EQUILIS qui porte le projet, ces délais ont été nécessaires pour bien calibrer le programme entre tous les acteurs, notamment avec les collectivités territoriales (la commune de Valbonne et la Communauté d’Agglomération Sophia Antipolis) et les architectes des bâtiments de France (ABF). Il y a en effet un temps incompressible administratif pour pouvoir sortir une opération de cette envergure (25 000 m²), et plusieurs contraintes liées au site ont dû être intégrées (dont une modification du PLU). Comme il le dit lui-même : « La première contrainte du site, c’est l’altimétrie. Vous avez 20 mètres entre le point le plus haut et le point le plus bas. L’architecture et le volet paysager du projet ont donc été pensés en restanques. » 


Le projet de La Canopée est ambitieux, et pas que budgétairement. C’est le premier programme mixte bureaux-logements qui se construit au cœur de la technopole Sophia Antipolis parmi les sept à venir, et il a la particularité de se bâtir sur la friche tertiaire des anciens Espaces Antipolis, route des Crêtes. Deuxième contrainte non négligeable. Mais de cette contrainte, EQUILIS a su faire une force car l’entreprise dispose d’un savoir-faire technique particulier ce qui lui permet d’être habile en montage technico-financier. La plus grande partie des bâtiments va être démolie mais le programme réussit à conserver les 200 places de parking existantes en sous-sol auxquelles s’ajouteront 620 places souterraines pour ne pas polluer visiblement les extérieurs du site. Sobriété de construction assumée donc, avec pour corollaire non négligeable des économies conséquentes en béton et en matériaux. 


Vont donc bientôt sortir de terre 212 logements du studio au 4 pièces duplex, dont 93 logements pour actifs à prix maîtrisés en accession sociale et en location, et 13 000 m² de bureaux en deux bâtiments. Un bâtiment de bureaux est déjà vendu et la livraison des logements est prévue en 2025 (la commercialisation est déjà en cours). C’est l’architecte Robert Capelier qui a relevé le défi architectural de La Canopée avec l’ambition de mixer les usages de manière fluide dans un écrin de verdure. Les appartements sont répartis dans de petits bâtiments résidentiels aux formes arrondies sur deux plateformes, haute et basse. Les bureaux sont au milieu. Au niveau énergétique, piège à carbone, ossature bois et panneaux photovoltaïques en autoconsommation pour les bureaux, et pour le résidentiel, pompes à chaleur individuelles et toitures végétalisées permettant une isolation optimale et la récupération des eaux. La patte paysagère est importante et au-delà des études d’impact et environnementale obligatoires, une étude de défrichement a également été faite. La philosophie environnementale du programme est de conserver certaines essences existantes et il est prévu de replanter en fin de chantier les arbres qui ont été déplantés pendant la phase de démolition/(re)construction. Plus de 55 % du site est dédié aux espaces verts et deux bâtiments prévus initialement en partie basse ne se feront finalement pas pour caler au mieux à l’approche paysagère souhaitée. Ces concessions ne sont pas neutres en termes financiers, mais elles vont dans le sens de la préservation des espaces boisés, chère aux aménageurs de la technopole, pour ne pas perdre le contrôle du site. 


« Un promoteur, c’est un assemblier de compétences, de savoir-faire et de finances. Un projet doit être ancré dans son territoire et doit avoir un impact positif dessus. Pour bien comprendre les enjeux de chaque implantation, on doit s’appuyer sur des architectes locaux sur des bureaux d’études locaux, et travailler de concert avec les collectivités territoriales. Les besoins des territoires sont différents. Le traitement du carbone ou de l’eau par exemple n’est pas le même à Sophia qu’à Tourcoing. Il faut à chaque fois s’adapter au contexte des sites.» S’il rappelle ces évidences, Laurent Tirot est en passe de réussir un pari ambitieux sur Sophia. Vert, esthétique, vivant. 

Parution magazine N°41 (juin, juillet, août)

Qu’en pensez-vous ?

Donnez-nous votre avis

Pour vérifier que vous êtes une intelligence humaine, merci de répondre à ce questionnement lunaire.