Maestro !

Par Frank Davit, 28 février 2024 à 12:53

Arts en scène

Nommé en décembre dernier à la tête de l’Orchestre philharmonique de Nice, Lionel Bringuier a tout pour lui. Artiste d’une stature internationale, le Niçois trentenaire conjugue émotion et brio pour faire palpiter la musique jusqu’à l’âme.


Impetuoso, le mot lui va comme un gant. On sent la fougue à l’œuvre en lui, au bout de sa baguette. On y voit la flamme également, comme s’il traçait des étincelles dans l’air en la maniant face à ses musiciens. Au pupitre, voici Lionel Bringuier. Difficile de résister à l'onde de charme du monsieur, éternel jeune homme du haut de ses trente-sept ans qu'il ne paraît pas un instant. Il est la simplicité et le naturel même. Mais où Lionel Bringuier planque-t-il donc son magot d’ego pour savoir allier avec tant d’aisance le talent et la bonhomie souriante ? Il a très vite franchi les étapes sur les chemins de la consécration. Á croire qu’une fée de la musique a dû prendre bonne note, dès son plus jeune âge, de son potentiel précoce de petit poucet musicien pour le guider sans embûche jusqu’à ce point d’accomplissement harmonieux. Jugez plutôt. Du haut de ses quatorze ans, il dirige pour la première fois un orchestre symphonique. Plus tard, un premier prix de violoncelle du Conservatoire de Paris en poche, il remporte à l’âge de dix-neuf ans le concours de Besançon, c’est-à-dire le graal pour lancer la carrière d’un jeune chef. Vingt et un an sonne pour lui le temps de la reconnaissance internationale : il est nommé chef assistant de l’Orchestre philharmonique de Los Angeles, recruté à ce poste par une pointure du métier, le chef Esa-Pekka Salonen. Sa carrière s’envole, et lui avec. Lionel Bringuier se produit aux quatre coins du monde mais l’ogre du succès ne l’a pas dévoré. Il reste attaché à Nice, sa ville natale. Il y a grandi, sa famille y réside. Après être rentré en Europe pour diriger (notamment) les destinées du Tonhalle Orchester de Zürich, c’est Nice qui, tout naturellement, va redevenir son port d’attache. Par le passé, il s’y était déjà illustré à plusieurs reprises dans l’exercice de son art. Pour son retour en haut de l’affiche, l’enfant prodige se voit programmé à l’occasion de concerts de prestige à l’Opéra de Nice. D’abord en qualité de chef associé et, depuis décembre dernier, en tant que chef attitré de l’Orchestre philharmonique de Nice. « C’est un rêve d’enfant qui se réalise, confie Lionel Bringuier. Depuis quatre ans, j’avais établi un lien étroit avec le philharmonique niçois. Je connais bien l’ensemble des instrumentistes de la formation. Nous sommes sur la même longueur d’ondes, l’amour de la musique nous réunit et nous porte. On partage une histoire commune, où je ne suis qu’un musicien parmi les autres musiciens… »


Les délices du chef


Pour faire rayonner l’Orchestre philharmonique de Nice dans toute la palette de ses couleurs instrumentales, Lionel Bringuier a sa formule : s’entourer des solistes les plus en vue de la scène musicale. Au gré des concerts qu’il donne à l’Opéra de Nice, où l’orchestre joue à domicile, il invite ainsi régulièrement des musiciens vedettes à se produire avec la formation niçoise. Des musiciens pourvoyeurs de grands frissons qui enchantent le public et mettent en lumière les qualités de celle-ci. Le violoniste Renaud Capuçon ou son frère, le violoncelliste Gautier Capuçon. Les pianistes Hélène Grimaud, Philippe Bianconi, Alexandre Tharaud ou Nicolas Bringuier, frère de Lionel. Tour à tour, ces grands noms sont venus marier leurs accords à ceux du philharmonique, sous la baguette de Lionel Bringuier. « Ce sont des amis, sourit ce dernier. Je suis toujours heureux et honoré de les inviter à partager leur art devant le public niçois, aux côtés de l’Orchestre philharmonique de Nice qui m’est désormais encore plus cher, à plus d’un titre… »


Sur l’agenda des concerts de Lionel Bringuier


Ce printemps, on retrouve le chef dans ses œuvres, à l’Opéra de Nice où il dirigera une soirée musicale qui fait écho aux Jeux Olympiques, via une œuvre du musicien Pierre Ruscher donnée en création mondiale, « Citius, altius, fortius » (Plus vite, plus haut, plus fort). Autre temps fort de la soirée, le concerto pour violon n°2 de Félix Mendelssohn avec Renaud Capuçon en soliste invité. Quant aux prochaines interventions de Lionel Bringuier dans son fief niçois, on sait d’ores et déjà qu’il dirigera le concert du nouvel an, le 1er janvier 2025, ainsi qu’un ouvrage lyrique, pour la toute première fois à Nice, dans une mise en scène de Daniel Benoin (à l’heure où ces lignes sont écrites, la nouvelle programmation de l’Opéra de Nice n’a pas encore été dévoilée).




Concert événement de l’Orchestre philharmonique de Nice,

sous la direction de Lionel Bringuier, avec Renaud Capuçon en soliste invité,

le 14 juin à l’Opéra de Nice



De la baguette à la lorgnette


Décidément, ces temps-ci, les chefs ont la cote, et pas seulement les cuistots gros biscottos de la gastronomie hypertrophiée qui nous est servie à tour de bras partout dans les médias. Ainsi, dans la peau de Leonard Bernstein pour les besoins du biopic qu’il lui a consacré, l’acteur réalisateur Bradley Cooper a fait le buzz. Traversé des dissonances intimes du compositeur de West Side Story, son œuvre la plus connue, Maestro raconte l’homme derrière le chef de légende que fut Bernstein. Dans le rôle de son épouse au grand cœur, l’actrice Carey Mulligan étincelle. Bradley Cooper, lui, met toute sa fièvre au service de son personnage en clair-obscur mais au fil du film, sa partition de cinéaste s’embourbe dans un psychodrame sentimental éculé. Autre long métrage au diapason d’une vie de chef, Tár, sorti en 2022, a également défrayé la chronique avec son portrait au vitriol d’une cheffe d’orchestre fictive interprétée par Cate Blanchett. Aussi magnétique que méphistophélique, celle-ci a reçu pour sa prestation un prix d’interprétation à la Mostra de Venise.


Parution magazine N°44 (mars, avril, mai)

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