nLightenment
sur les impératifs de sobriété

Par Cédric Stanghellini, 26 juin 2025 à 22:51

Énergivores

À l’heure où l’intelligence artificielle bouscule les équilibres numériques, les centres de données deviennent des infrastructures critiques. Leurs besoins en calcul et en stockage explosent, tirés par les usages génératifs de l’IA. Cette croissance s’accompagne d’un coût énergétique considérable. Alors comment concilier l'impératif de transition numérique avec celui de sobriété environnementale ? Anwar Saliba, directeur général de nLighten France, nous a ouvert les portes du site d’Antibes pour évoquer les enjeux d’une IA plus responsable.

Réduire l’empreinte des centres de données


Pourquoi un centre de données consomme-t-il autant d’électricité ?


Vous devez comprendre ce que nous hébergeons : des infrastructures et serveurs informatiques des hébergeurs et fournisseurs de services numériques qui fournissent eux-mêmes leurs services à des centaines d’entreprises et des milliers d’utilisateurs finaux. Des infrastructures informatiques qui fonctionnent 24 heures sur 24. Ils effectuent des calculs, ils traitent des données. Ces actions génèrent de la chaleur, à l’image du ventilateur d’un ordinateur portable qui se déclenche lorsqu’il est utilisé. Nous devons donc refroidir ces serveurs.


Quelles actions concrètes avez-vous mises en place ?


Le data center d'Antibes a été conçu en 2009, à une époque où la recherche de l’efficacité énergétique n’était pas au cœur des préoccupations comme aujourd’hui. C’est pourquoi nous avons engagé un vaste programme de rénovation en 2023. Un nouveau design plus vertueux pour héberger les serveurs, de nouveaux équipements électromécaniques moins gourmands, mais aussi la revalorisation de la chaleur fatale produite. Nous avons réduit de 15 % notre consommation d’électricité.


Comment arrivez-vous à valoriser cette chaleur produite ?


Auparavant, l’air chaud produit par notre data center - ce que l'on appelle « chaleur fatale » - était tout simplement rejeté dans l’atmosphère. C'était un réel gaspillage auquel il fallait remédier. Désormais, nous récupérons une bonne partie de cette chaleur pour maintenir à température des zones tertiaires et certains équipements comme les groupes électrogènes.

L’intelligence artificielle nous aide déjà à piloter notre efficacité énergétique. Nous utilisons des systèmes d’analyse qui détectent des événements de surconsommation, qui optimisent le process de refroidissement et qui cherchent à prévenir les défaillances. L’IA permet de simuler différents scénarios énergétiques et de choisir les plus efficients.


Ces efforts ont porté leurs fruits. En février 2025, notre data center d’Antibes a reçu le Trophée d’Or du Podium Efficacité Énergétique dans le cadre du championnat de France des économies d’énergie. C’est une belle reconnaissance de notre engagement pour une infrastructure numérique plus verte, et c'est une incitation à aller encore plus loin.


La prochaine étape est de produire de l’énergie électrique ou calorifique à partir de la chaleur fatale.


L'offre ne suit plus la demande...


Quel est l’impact de l’intelligence artificielle sur vos infrastructures ?


Nous assistons à une explosion des besoins. Ce qu’on appelle intelligence artificielle existe depuis le 20e siècle, mais ce sont la technologie et le progrès technique de ces dernières années qui ont permis son entrée fulgurante dans nos vies. L’IA générative a provoqué une explosion des besoins en calcul, en mémoire, en puissance. Les modèles doivent être entraînés, puis utilisés et cela nécessite toujours plus de serveurs et donc toujours plus d’énergie consommée.


Face à cette hausse des besoins en serveur, chez nLighten France nous nous adaptons de plusieurs manières. Nous poursuivons la modernisation de nos infrastructures existantes pour les rendre plus performantes. Nous poursuivons aussi notre logique d’implantation territoriale. Car avec l’IA, plus le traitement de la donnée se situe près de l’utilisateur final, plus la durée de latence sera courte, l’expérience avec les outils mobilisant l’IA sera donc plus agréable. Un dernier volet enfin concerne le développement en taille de certains de nos data centers.


Nous redimensionnons actuellement notre second site de Sophia Antipolis pour répondre efficacement aux besoins de l’IA. C’est un investissement de plus de 50 millions d’euros. Ce développement est stratégique pour la technopole, car le territoire concentre de nombreux acteurs exigeants en ressources numériques et qui sollicitent de plus en plus l’IA dans leur processus : entreprises innovantes, laboratoires de recherche, établissements scolaires et universitaires, mais aussi des services publics. Pour maintenir sa place de référence dans le paysage économique français, Sophia Antipolis pourra ainsi compter sur un data center totalement orienté pour répondre aux nouveaux besoins.


Peut-on réellement concilier cette croissance avec les objectifs climatiques ?


C’est tout l’enjeu. Si en France l’énergie est disponible pour le développement de nos data centers, il ne faut pas que nous nous retrouvions face à un mur. Quand on fait une recherche en ligne ou qu’on interagit avec un outil conversationnel, nous n’imaginons pas toute l’énergie que cela mobilise. De ce que je vois, les tendances n’envisagent pas de ralentissement dans le développement et le déploiement de l’IA. C’est la raison pour laquelle les acteurs de ce marché intègrent à présent l’efficience énergétique dès la conception. La mise en place de centres de données plus vertueux pour l’environnement est aujourd'hui indispensable.



Le saviez-vous?

Grâce à un contrat d’engagement signé avec leur fournisseur d’électricité, l’énergie consommée par les data centers de nLighten France provient de sources d’énergie renouvelable. Ces certificats garantissent que chaque kilowattheure acheté est compensé par une production équivalente d’énergie verte injectée dans le réseau.

Parution magazine N°49 (juin, juillet, août)

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