+1 029% de croissance,
Kalray passe en hypercroissance

Par La rédaction, 17 mai 2023 à 13:18, Sophia Antipolis

De Tech à tech

Kalray a installé un centre de R&D d’excellence depuis quelques années sur Sophia Antipolis. Design de puces, électronique, développement d’algorithme, code, IA, nouvelle génération de stockage, l’entreprise s’est spécialisée sur la haute technologie et le traitement des données TRES rapide. C’est un peu notre Nvidia européen en somme et cocorico oblige, il a l’un de ses points d’ancrage au Sundesk de Valbonne. Eric Baissus, Président du Directoire de Kalray, répond à 3 questions, pour la rédaction de SophiaMag.

Kalray a fait un bond de + 1 000 % de CA en un an et a pour ambition de se positionner leader dans les solutions de traitement intensif des données. Est-ce que le spatial fait partie de vos secteurs cibles ?


Il y a bien sûr un besoin de traitement des données au niveau de l’industrie du spatial et on est là face à un vrai challenge, trouver des puces qui puissent aller dans l’espace et tenir. Cela demande en effet un certain nombre de spécificités, notamment en termes de robustesse par rapport aux radiations, et en termes de consommation d’énergie également, car sur un satellite, vous n’avez pas beaucoup de batteries. Kalray étudie avec plusieurs acteurs du secteur spatial, dont Spacetel, la capacité de nos puces à être utilisées dans l’espace. C’est un réel sujet mais ce n'est cependant pas un marché très rentable car pour réaliser du chiffre d’affaires, il est nécessaire de vendre des puces en volume, or les données sont aujourd'hui plutôt produites et utilisées sur Terre que dans l’Espace. Les besoins et la demande concernent donc davantage les puces adaptées aux usages terriens. Une transmission de plusieurs térabytes par jour d’information depuis l’Espace peut sembler beaucoup mais si l’on compare aux données transmises sur Terre, le volume est négligeable. Dans les datacenters, ce sont plusieurs pétabytes qui sont traités et stockés chaque jour (1 pétabyte = 1 000 térabytes). Le spatial est donc un sujet sur lequel nous travaillons, mais ce n’est pas notre cœur de cible.



Votre CA est réparti entre l'Europe, à hauteur de 57 %, et les États-Unis à 43 %. Les marchés asiatiques sont absents ainsi que les pays émergents. Pourquoi ?


Dans nos domaines, ce sont les États-Unis qui ont été pionniers et le marché américain est de loin le marché le plus développé aujourd’hui. Nous souhaitons développer notre présence aux Etats-Unis et avons annoncé il y a quelques mois la signature d’un très gros contrat avec un important acteur américain du secteur. Kalray a également rejoint le programme très sélectif Extended Technologies Complete (ETC) en tant que partenaire principal pour les offres de Dell Technologies dans le domaine du stockage. Depuis, les équipes de Kalray travaillent étroitement avec les forces de vente et d’avant-vente de Dell initialement aux États-Unis et depuis le début de l’année, en Europe. En parallèle, nous commençons à nous développer sur le continent asiatique. La pandémie de Covid a ralenti le démarrage des activités, mais nous commençons à avoir des clients en Asie et cela progresse petit à petit.



Quels sont les principaux enjeux pour votre activité ?


Il y a plusieurs volets. Sur le plan géopolitique, nous concevons des puces extrêmement stratégiques, il y a donc un réel intérêt en termes de souveraineté européenne. Comme n’importe quel produit sensible, nous sommes soumis à des règles à l’export évidentes qui empêchent certains pays d’accéder à des technologies comme la nôtre. Nous sommes beaucoup soutenus par l’Europe. Kalray est aujourd’hui le seul acteur européen capable de concevoir un type de puce de ce niveau de performance avec une faible consommation énergétique. Récemment, le collectif DeepGreen[1], auquel Kalray participe, a annoncé le lancement d’un projet de plateforme open source basée sur l’outil de deep learning embarqué N2D2 du CEA, qui va permettre de concevoir, d’optimiser et de déployer les réseaux de neurones IA sur des cibles matérielles variées. L’IA embarquée propose des solutions de traitement des données au plus près de leur source et doit donc pouvoir combiner hautes performances de calcul, fiabilité et frugalité. Le CEA estime que si actuellement, 80% des flux de données sont traités sur le Cloud et 20% localement, l’ordre de grandeur pourrait s’inverser d’ici 5 ans. Au regard de ces prévisions, il est fondamental de se préparer collectivement pour pouvoir disposer d’équipements performants en France et en Europe pour accompagner le déploiement de ces solutions embarquées. Ce projet est un important projet de R&D collaboratif, co-financé par les États-Membres de l’Union européenne et piloté par le CEA pour les acteurs français. C’est un réel enjeu de souveraineté et Kalray y prend toute sa part.


Un deuxième enjeu de l’industrie du semiconducteur porte sur la sécurisation des chaînes d’approvisionnement. Toute notre industrie est fabless, c’est-à-dire que notre métier consiste à créer des puces mais pas de les fabriquer. Comme Apple ou beaucoup d’autres, Kalray n’a pas d’usine. Nos puces sont manufacturées chez TSMC, à Taiwan pour le moment (en attendant l’usine européenne …). Pendant la Covid et jusqu’à début 2023, il y a eu des ruptures d’approvisionnement du fait de la très forte demande et des baisses de capacités de production. Les datacenters ont été beaucoup sollicités pendant la pandémie et il y a aussi eu un mouvement de masse, beaucoup de sociétés se mettant à faire du stock pour ne pas souffrir de pénurie, créant des pénuries pour les sociétés qui ne stockaient pas. Aujourd’hui, c’est derrière nous, la situation est revenue à la normale.


Un troisième enjeu est réellement sociétal. Nous évoluons sur un marché qui correspond à un besoin crucial, dans un monde où la data est omniprésente. Nous générons tous des données, qui n’ont de sens et de valeur que si elles sont analysées. Il y a un besoin de plus en plus important de technologies embarquées dans nos sociétés toujours plus digitales, et qui ont un besoin croissant d’analyser ces données pour les exploiter. La Covid a eu un effet accélérateur de l’usage digital. La demande est en train d’exploser. Kalray évolue justement sur ces marchés en plein essor et notre avance technologique est un atout certain.



À vos CV...


Kalray s’attelle aujourd’hui à développer sa puce de quatrième génération. Ultrasophistiquée, extrêmement fine (une technologie de 4 nanomètres quand la troisième génération était basée sur du 16), Dolomites – il suo nome misterioso - va permettre un grand saut en termes de performance. Ces puces vont être utiles partout où il y a beaucoup de données à analyser (télécoms, stockage intensif des data centers) et l’un des enjeux va être de les traiter en consommant le moins d’énergie possible. Bonne nouvelle, l’entreprise recrute pour l’aider à développer cette nouvelle génération de puces et par extension, le logiciel qui va avec pour permettre une utilisation client. À vos CV donc pour partir à l’assaut du Mont Marmolada (3 343 mètres)…



[1] Les partenaires du projet DeepGreen sont : Adagos, Airbus, ArcelorMittal, Arcys, CEA, CS GROUP, Dassault Aviation, Datakalab, Dolphin Design, EDF, Ezako, HawAI.tech, Inria, Kalray, MBDA, ONERA, Pulse Audition, SysNav, Thales

Parution magazine N°41 (juin, juillet, août)

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