Ephéméride géopolitique
Le Monde vu de Sophia

© Adobe Stock
2023, de mois en mois
Janvier
Virage à l’Est cette année en matière de gouvernance mondiale. L’Inde a pris la présidence du G20 pour un an jusqu’au 30 novembre prochain, et c’est le Japon qui assure la présidence du G7 en 2023 et qui prépare le prochain Sommet en mai, à Hiroshima. On entend dans les couloirs que la Chine est en passe d’être détrônée de son étiquette de pays le plus peuplé du monde, et au-delà du podium, l’information importante est que deux pays parmi les 195 États reconnus par les Nations unies comptabilisent à eux seuls plus de 35 % de la population mondiale. Toujours à l’Est, plus discrètement, la Croatie est devenue en janvier le vingtième pays membre de la zone euro.
L’hiver a eu son lot de casse et certains s’en sont sortis mieux que d’autres. La technopole de Sophia pour le moment a l’air d’avoir été épargnée des fermetures en série d’entreprises et chacun négocie comme il peut son contrat d’énergie à venir en espérant limiter l’envolée des charges. Les verriers de Biot ont eu chaud. Littéralement. Avec des fours qui doivent rester en fusion en permanence à 1 200 degrés pour pouvoir exercer, leur facture d’énergie a triplé et ils tombent en-dehors des clous de la limite de hausse à 15 %. Double peine, le prix du verre importé d’Allemagne a également doublé. Cet exemple très concret montre que la crise des matières premières est loin d’être derrière nous et dans beaucoup d’activités on continue à se triturer les méninges pour capter verre, bois, acier, semi-conducteurs, à des conditions raisonnables.
Février
L’expression ‘finlandisation’ est en passe de devenir désuète. Après des décennies à l’écart des alliances militaires dans son rôle tampon entre les États-Unis et la Russie, la Finlande est en passe de rejoindre l’OTAN. Des 30 membres de l’Alliance, 28 ont déjà ratifié les protocoles d’adhésion pour la Finlande et la Suède. La Turquie, membre de l’Alliance depuis 1952, et la Hongrie, membre depuis 2007, se font encore attendre même si les deux pays ne devraient pas tarder à se prononcer officiellement.
En attendant, les effets concrets du conflit russo-ukrainien arrivent par ricochet sur les économies du monde. La Russie a annoncé qu’à partir du 1er février, elle mettrait le holà à ses exportations de pétrole à destination des pays qui pratiquent le plafonnement du prix du baril (en fin d'année dernière, les pays du G7 s'étaient en effet accordés sur un prix plafond de 60 dollars par baril pour le transport maritime). La Russie vient également d’annoncer l’arrêt de livraison de pétrole à la Pologne via l’oléoduc reliant les deux pays. C'est donc le début d’autres hostilités en somme, par proxy de guerre économique. Pendant ce temps, dans certaines stations de Sophia Antipolis, le SP98 monte à plus de 2 euros le litre. Un effet papillon dont on se serait bien passé.
Le séisme du 6 février qui a durement frappé la Turquie et la Syrie a une fois de plus réveillé les solidarités internationales et a mis de côté - au moins temporairement – les tensions géopolitiques. Les sauveteurs grecs n’ont pas hésité à aller porter secours aux Turcs et un poste-frontière fermé depuis trente ans entre l’Arménie et la Turquie a été réouvert pour acheminer de l’aide. À distance, la technopole de Sophia Antipolis n’a pas été en reste et plusieurs initiatives territoriales, associatives et privées ont été au rendez-vous de l’urgence, en complément des solidarités qui continuent de se faire à d’autres endroits de la planète.
Mars
8 mars particulièrement amer cette année pour tous ceux qui ont un ancrage en Iran, en Afghanistan, et partout encore où les femmes n’ont pas les mêmes droits que leur père et leurs frères. Un quart déjà dans le 21e siècle et toujours dans cette lutte de sexes inutile. Contreproductive. Arriérée. Gâchis de trop de temps, d’énergies et de vies.
Cette année marque aussi le trentième anniversaire de la Journée mondiale de l’eau, une initiative impulsée par les Nations unies en 1993 pour sensibiliser le public à la ressource, tous les 22 mars, afin de l'inciter à la sobriété. C’est l’occasion de rappeler que l’Office international de l’eau a une antenne sur la technopole, place Sophie Laffitte, et que cette association reconnue d'utilité publique œuvre en France et à l’international depuis plus de trois décennies. C’est l’occasion de rappeler aussi qu’ouvrir un robinet n’est pas un dû pour le tiers de l’humanité.
Avril
Depuis le 14 avril dernier, les affrontements au Soudan nous rappellent que les guerres ne se déroulent pas qu’à notre Est. L’Iran a mis en place de nouvelles mesures de répression causant la fermeture de plus de 150 commerces et continue de pendre des gens. Les ministres iranien et saoudien des Affaires étrangères se sont rencontrés début avril à Pékin pour annoncer la normalisation de leurs relations après des années de tensions et pour la première fois depuis le début de la guerre Ukraine-Russie, le président ukrainien s’est entretenu pendant plus d’une heure au téléphone avec son homologue chinois Xi Jinping. Si même la diplomatie du monde vire à l’Est pour stabiliser le Moyen Orient et les relations russo-ukrainiennes, à quoi va bien pouvoir servir notre vieux continent ?
Mai
Comme tous les ans, le 3 mai marque la Journée mondiale de la liberté de la presse, l'occasion de ne pas oublier que la désinformation massive est la menace de notre siècle. Et comme tous les ans à la même date en miroir, Reporters sans frontières publie son Classement mondial qui évalue les conditions d’exercice du journalisme dans 180 pays. Le constat est mauvais pour 7 pays sur 10. La situation est estimée 'très grave' dans 31 pays, 'difficile' dans 42 et 'problématique' dans 55. La France grignote deux places (24ème), entre l'Afrique du Sud et le Costa Rica.
Pendant ce temps, le roi d’Angleterre est couronné dans un faste qui, pour un observateur extérieur, semble quelque peu hors du temps. Le Premier ministre néo-zélandais a déclaré son souhait de voir le pays quitter le Commonwealth -sans urgence - et l’Australie fait peu à peu disparaitre les effigies des souverains britanniques sur ses billets de banque. Weekend de l’Ascension studieux pour le G7 à Hiroshima, les Turcs s’apprêtent à se rendre aux urnes, et subrepticement, les BRICS travaillent à un projet de monnaie commune pour peser différemment sur les finances du monde. Depuis quelques jours, leur PIB cumulé dépasse celui des pays du G7.
Juin
L’appel du 18 juin des Suisses sera de se prononcer par les urnes sur la loi Climat qui fixe des objectifs intermédiaires contraignants et des valeurs indicatives pour les bâtiments, l’industrie et les transports. Peut-être enfin un cadre clair quelque part pour les forces vives économiques et pour le grand public. L'avenir nous dira si ces normes sont réalistes et pertinentes ou si cette énième loi Climat contraindra sans effet. Les Qataris et -ies se rendent aussi aux urnes pour renouveler leur Conseil municipal. Peu d’enjeu dans un pays sans parti politique avec un Conseil municipal réduit à un rôle consultatif.
Juin sonne aussi 300 ans d’économie politique avec plusieurs célébrations marquant la naissance du philosophe et économiste écossais Adam Smith. L’auteur de La richesse des nations a été le premier à synthétiser clairement les grands principes du libéralisme économique. L'origine de la richesse ne serait ainsi ni l’or ni la monnaie mais le travail des hommes, et à la base de sa doctrine, la valeur travail est portée aux nues. En cette période de transformation sociétale intense où le travail des machines (re)-commence à télescoper celui des hommes, il est certainement temps de relire ses classiques.
Qu’en pensez-vous ?
Donnez-nous votre avis
Pour vérifier que vous êtes une intelligence humaine, merci de répondre à ce questionnement lunaire.