Opéra de Nice
la fièvre dans le chant
Arts en scène

Company © Jean-Michel Molina
La nouvelle saison de la maison lyrique niçoise déploie sa voilure, avec un mot d’ordre qui a valeur de manifeste artistique:
Libres d’esprit !
Huit spectacles musicaux, qui vont du bel canto de Donizetti à la comédie musicale de Broadway en passant par Mozart et Philip Glass, sans oublier Verdi et Puccini. Trois sessions de ballet sur les pas de chorégraphes stars hautement novateurs : Pontus Lidberg, directeur du Ballet de l’Opéra de Nice, Sidi Larbi Cherkaoui et Benjamin Millepied (entre autres). De nombreux concerts où, dirigé par Lionel Bringuier, son chef attitré, l’Orchestre Philharmonique de Nice sera à l’honneur et où l’on découvrira une formation qui vient de voir le jour, l’Ensemble Baroque du Philharmonique de Nice. Des rendez-vous jeunesse pour chatouiller joliment les oreilles d’un auditoire en herbe…

Voilà de quoi attiser les impatiences devant les promesses de la nouvelle saison de l’Opéra de Nice. Depuis la rentrée de septembre, la vénérable maison, qui n’a pas l’âge de ses artères (140 ans cette année), slalome tout schuss sur les monts et merveilles de sa soif d’audace et d’aventures scéniques qui décoiffent ! Un souffle, une énergie, une matière vive... Si on voulait mettre en musique l’effervescence artistique de l’Opéra, elle aurait une tonalité couleur Libertango façon Astor Piazzolla. Mouvance qui emporte. Flamme et fougue. C’est en quelque sorte le tempo adopté par l’Opéra de Nice pour mener sa danse la saison prochaine. Celui qui donne sa pulsation, son élan, à ce haut lieu du chant, de la musique et de la grâce.
Le démon du jeu
Bertrand Rossi, directeur de l’Opéra, est l’homme-orchestre de cette partition qui entend bien faire des étincelles. Allumer le feu du public sur d’autres chemins de création, hors des sentiers battus. Faire résonner ensemble des œuvres d’hier et des productions d’aujourd’hui. Pour la partie lyrique de sa saison, l’Opéra poursuit sur sa lancée et reste fidèle à son atout maître : le démon du jeu ! Entendez par là son envie de jouer avec le répertoire, son goût pour des spectacles aux séductions actuelles, pop, en prise avec l’évolution des mœurs, les changements de société.
Habitué de la maison, après sa sidérante Juliette ou la clé des songes cet hiver, le duo Jean-Philippe Clarac & Olivier Deloeuil (le Lab) va ainsi proposer l’hiver prochain sa vision de La Clémence de Titus de Mozart. Sur une autre longueur d’ondes créatives, Edouard Signolet, déjà vu à l’œuvre au TNN avec une réjouissante variation sur le Petit chaperon rouge, mettra en scène une fantaisie en forme de conte musical, Poucette, visible dès 7 ans. Enfin, si l’Opéra de Nice est un royaume enchanté, il a sa reine, en la personne de Lucinda Childs. Après son mémorable Akhnaten ici même il y a quatre ans, l’iconique chorégraphe américaine revient une nouvelle fois sous les auspices du non moins iconique compositeur Philip Glass pour Satyagraha, évocation de la pensée de Gandhi. Autre Américain royal à l’affiche, Stephen Sondheim, un maître de la comédie musicale, avec Company, l’un de ses chefs d’œuvre. Trois grands de l’opéra italien offriront aussi des moments forts de la saison. Verdi avec La Traviata. Donizetti pour Don Pasquale et Puccini pour un ouvrage de jeunesse, Le Villi. La programmation lyrique s’achèvera par un happy end avec la création mondiale d’Un monde ensemble, opéra rock de Sergio Monterisi et Magali Thomas.
Entrée des artistes
Faire dans la demi-mesure, l’Opéra de Nice ne l’entend pas de cette oreille. Sismographe du présent et de son monde d’émotions, il vibre au diapason du travail scénique d’artistes iconoclastes, polymorphes. Lucinda Childs en est une, qui brille du plus fin éclat dans le sillage des plus mémorables créations de ces cinquante dernières années, à l’image d’Einstein on the beach, opéra fleuve de Philip Glass. Pour une large part, la carrière de celle-ci fait corps avec la musique du compositeur. Monté en 1976 par un géant de la mise en scène, Robert Wilson (disparu cet été), lors d’un spectacle d’anthologie présenté en Avignon, Lucinda Childs était l’une des interprètes d’Einstein on the beach, production novatrice culte. Elle retrouve Glass pour son ballet phare Dance, créé en 1979 sur les accords hypnotiques du musicien, et c’est une fois de plus par un chef d’œuvre de modernité légué à la postérité que se poursuit la fructueuse collaboration entre ces deux-là. La route de la chorégraphe a aussi croisé le nom d’un autre pape de la contre-culture, l’artiste Robert Rauschenberg, l’un des instigateurs d’une mouvance pour un art total, entre spectacle, performance et arts plastiques au cœur d’un New York des années 60 en pleine expérimentation de nouveaux canons esthétiques.
Après le triomphe d’Akhnaten en 2021, le retour de Lucinda Childs à l’Opéra de Nice en ouverture de la saison lyrique pour Satyagraha fait ainsi figure d’événement, à plus d’un titre. Etienne Guiol, l’orfèvre des visites immersives qui, tout l’été, ont fait de l’Opéra un luxuriant manège d’images, sera à ses côtés pour la pyrotechnie d’ombre et lumière des représentations.
À l’autre bout de la saison, fin mai, et à l’opposé du spectre musical de Philip Glass, c’est une autre production qui va faire sensation. Celle de la Traviata de Verdi, portée par la mise en scène de Silvia Paoli. Nouveau talent déjà reconnu par la critique, Silvia Paoli a donné une autre étoffe au personnage de Violetta, l’héroïne de l’opéra, dans un spectacle qui n’en perd pas moins de vue les fastes en costume d’époque de son intrigue. Lors de sa création en janvier dernier à l’Angers Nantes Opéra, le spectacle a recueilli les faveurs du public. Dans l’intervalle, au cœur de la saison, et toujours dans cet esprit d’hybridation des répertoires et des sensibilités artistiques de tous bords cher à Bertrand Rossi, le Don Pasquale de Donizetti se verra mis en verve par l’un des « entertainers » les plus accomplis de la scène théâtrale et musicale anglaise, Tim Sheader.
Les chaussons bougent
Lui aussi est un agitateur du monde de la danse et du spectacle. Chorégraphe d’une stature internationale, Benjamin Millepied fera le miel du public des Fêtes avec une œuvre de jeunesse reprise pour l’occasion par le Ballet de l’Opéra de Nice. Il y revisite un classique du répertoire, Casse-Noisette, tout autrement que l’original. Le Ballet de l’Opéra de Nice qui évolue désormais dans le sillon tracé par son nouveau directeur, Pontus Lidberg. Venu de Suède, Pontus Lidberg est très reconnu dans les plus hautes sphères de la danse. Il apporte avec lui un nouvel élan, davantage axé vers des écritures chorégraphiques actuelles et des pièces inédites dans le catalogue de la compagnie niçoise. Premiers tours de piste de sa programmation cet automne avec De loin en loin, sur les pas d’un opus de Sidi Larbi Cherkaoui, Loin, et d’un ballet en création mondiale par Juliano Nunes. Puis, dès le printemps, sera à l’affiche Après la pluie, un double programme dansé, avec deux œuvres données à Nice pour la première fois, Dancing on the front porch of Heaven d’Ulysses Dove et la reprise de l’une des créations de Pontus Lidberg, Petrichor.
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